Tandis qu’un grand architecte agonise suite à un AVC, bâtisseur type Imotep de la vieille Égypte, il s’interroge sur ses relations féminines pour se donner du courage, remonter le temps avant que le temps ne fasse fi de sa mémoire. Claustrophobe catastrophé, livré à lui-même dans l’obscurité d’un hôpital, il égrène ses amours violents, ses aventures fugitives, les vieilles amours au fond du puits. L’architecte se rêve en homme sans qualités particulières, doutant du génie qu’on lui prête, parce que tout est factice dans ce monde y compris les complicités d’apparence. À cet artiste, les femmes reprochent de travailler trop alors que l’inspiration exige le silence, trouver la clef de l’inspiration. Encore un instant de bonheur, comme l’écrivait Montherlant, il conclut : tout n’est qu’illusion, un jeu qui se joue de nos sens, une suite de paradoxes qui excitent notre curiosité. On le sent proche de La Rochefoucauld. On le porte au pinacle ; il se sent petit homme dans la foule. Son temps et sa solitude sont insérés dans la durée des choses. Le voilà dans l’extrême angoisse arrivé à la conclusion qu’une amitié amoureuse vaut mieux qu’un serment brandi. Le remord et la solitude sont chez lui indissociables. « Sa lucidité est dévastatrice ». Tout au long de sa vie qui maintenant s’achève, parce que la maladie n’est qu’un mouvement progressif. Il balance encore une fois, une dernière fois : l’instinct au service de l’amour ou l’instinct dominateur destiné à ses réalisations d’architecte ? Gilles Cosson sait que tout est poussière, que tout n’est que professionnel.
Alfred Eibel.
Pierre-Guillaume de Roux éditeur, 214 p., 18 €.