Du légendaire Buddy Bolden aux « nappes de sons » de Coltrane, voici une nouvelle édition considérablement augmentée et mise à jour de ce dictionnaire. Un régal, des commentaires intelligents ; où l’on découvre les attaches que cette musique entretient avec Schönberg, Stravinsky, Webern. De plus, le jazz possède sa propre littérature. Souvenirs de la vie tragique d’Art Pepper, La rage de vivre, réminiscences de Dizzy Gillespie, l’écume de rage de Charlie Mingus, et pourquoi pas High times, Hard times d’Anita O’Day. Il est recommandé de suivre l’évolution du jazz depuis sa naissance si l’on ne veut pas se laisser piéger par des musiciens sincères sachant que « la sincérité n’est jamais une fin esthétique ». Musique d’improvisation, le jazz explose « comme on fait parler la poudre » écrivait Francis Marmande. Il oppose, par exemple, partisans d’Art Blakey aux partisans de Max Roach. Quant à Coltrane, n’avait-il pas l’ambition de résumer « toutes les musiques en un seul cri qui soit un message d’amour ». Ce dictionnaire n’oublie pas Stan Kenton et ses masques ou l’inestimable Woody Herman. On découvre aussi l’importance de Günter Schüller, les mérites de Leonard Feathern, le génie de Norman Granz. On suit Eric Dolphy le combattant, Tristano le professeur, Mal Waldron faisant bouger les lignes des partitions traditionnelles. On apprend que le grand interprète de Mozart et Beethoven, Friedrich Gulda, a travaillé avec Cecil Taylor. Que Willem Breuker, Joachim Kühn et Martial Solal méritent toute notre attention ; que le batteur suisse Daniel Humair est également un peintre coté. Bref, ce dictionnaires est une somme considérable.
Alfred Eibel
Laffont/Bouquins, 1472 p., 32 €.