L’auteur a « acheté des livres avec frénésie pendant plusieurs décennies ». Voici le résultat, un premier roman. Pascale Pujol y a mis toute son expérience ne gardant pas, comment dire, une poire pour la soif. Elle a cru bon, ce qu’on ne saurait lui reprocher, de montrer qu’elle savait écrire. Elle a bondé son roman de multiples personnages. Le lecteur pris au dépourvu pénètre dans ce livre à la manière d’un intrus en plein milieu d’une conversation. Il est temps de se ressaisir. Le lecteur arrive à suivre ce qui se dit, ce qui se passe, ce qui se fomente, en plein milieu d’une société hachée menu. Peu à peu il se rend compte que cet ensemble fragmenté se veut bon enfant, jamais rassasié, en permanence à l’affût des nouveautés, sujet aux déclarations pompeuses, heureux de vivre dans un monde simplifié évacuant les problèmes insolubles et qui joue avec les mots pour se donner une contenance. Râler caractérise ces personnages. Que ce soit Sandrine Cordier, une pôle-employée sachant ruser ou son mari Guillaume qui sait tromper son monde ; d’autres lascars, tous préoccupés par la bonne bouffe, tous se croyant immortels, installés en permanence sur le toboggan de la vie car ces jeunes gens et moins jeunes néanmoins jeunes d’esprit, se contentent de petites joies quotidiennes dites savoureuses. Plus on avance dans ce livre, plus on s’aperçoit à quel point cette société du gaspillage permanent, a du mal à se prendre au sérieux, jouant avec le faux ressenti et par conséquence toujours prête à dévider des dialogues passe-partout, à faire des inventaires car, il faut bien en convenir, la plupart des personnages de ce livre sont instrumentalisés par leur époque, menant des vies d’équilibristes, se voulant à la page, occupés à faire de l’esprit. Était-ce l’ambition de l’auteur ? En tout cas, Pascale Pujol saisit dans le détail les traits les plus futiles de ces vies improbables, ce qui n’est pas rien. Un miroir aux alouettes auquel le lecteur se laisse prendre sans rechigner.
Alfred Eibel
Éditions Le Dilettante
256 p. 19 €.