Puis-je vous dire un secret ? Crime glacé est un roman à suspense qui va vous donner des frissons et vous mettre l’eau à la bouche… ! Si Mary Higgins Clark est nommée « Queen of Suspense », Mary Jane Clark peut être baptisée « Princess of Suspense ». Ce livre est un film : Hollywood et ses célébrités venues se ressourcer dans la fontaine de jouvence du spa l’Elysium, un mariage en préparation, l’ « American Dream » dans toute sa splendeur… Le lecteur est plongé comme l’héroïne Piper Donovan dans ce monde délicieusement sucré où « La beauté est une denrée de poids dans la Cité des anges ». L’Elysium, dont Charles Baudelaire pourrait dire « Là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté », peut-il échapper au « mal [qui] existe dans la vie de tous les jours » ? Piper Donovan a-t-elle raison d’accepter l’invitation de Jillian Abernath, la fille du propriétaire de l’Elysium, de venir réaliser son gâteau de mariage ? Dans ce polar aux multiples rebondissements se mêlent luxe, meurtre, voyeurisme, création de pièces montées, chirurgie esthétique et vie d’un monastère… Après un prologue fort au crime glaçant, chaque fin de chapitre amène son lot de mystères, de soupçons et de questions… Qui est l’âme noire qui veut transformer ce paradis en enfer ? Qui est l’ange déchu de ce jardin d’Eden ? Qui veut gâcher la fête ? Le lecteur est happé par un suspense grandissant et accentué par des titres de parties sonnant comme un compte à rebours jusqu’au jour du mariage. Il veut comprendre l’énigme suivante : « Décidément, l’Elysium n’était pas le paradis terrestre que les gens imaginaient ». Telle Agatha Christie, la romancière égrène de nombreuses fausses pistes, construit un huis-clos tragique où chacun est un meurtrier potentiel, où certains personnages féminins pourraient crier #MeToo… Mary Jane Clark manie à merveille le suspense, la romance et le spectacle de la mondanité. En regardant évoluer les clientes de l’Elysium, on entend encore Charles Baudelaire : « Que c’est un dur métier que d’être belle femme ». Loin d’être seulement un triller domestique, Crime glacé interroge sur l’accès au rêve américain, la lutte des classes, l’obsession de certaines femmes pour la beauté, la jeunesse éternelle et l’apparence physique (« A l’image de bien des femmes, elle se montrait trop critique envers elle-même »). Mary Jane Clark nous raconte extrêmement bien Hollywood mais nous dit également de prendre garde à la douceur des choses et du langage qui n’est jamais neutre. Après avoir lu Crime glacé, vous ne regarderez plus votre médecin ni vos proches de la même façon, vous chercherez l’ennemi invisible qui se cache dans votre entourage, vous vous demanderez si, en écrivant, Mary Jane Clark a pensé à cette phrase d’Alfred Hitchcock : « Les blondes font les meilleures victimes. Elles sont comme la neige vierge qui révèlent les traces sanglantes ».
Laurence Eibel
Editions l’Archipel
271 pages, 21€