LIVRE de la RENTREE
Russes d’origine, Wladimir et Olga Kaminer ont obtenu la nationalité est-allemande avant la réunification. La gastronomie, c’est leur domaine de prédilection. La cuisine russe, ils l’ont mordue jusqu’au sang. Ils ont pioché dans celle de l’Arménie, de la Biélorussie, de Géorgie, de l’Ukraine, de l’Azerbaïdjan, de la Sibérie. Avec la verve qui les caractérise, c’est un roman à couverts mouchetés qu’ils nous offrent. Que d’épices hachées menu ; que de boulettes de viandes, de poissons, trempées dans les sauces les plus relevées ! Les Russes boulottent de l’ours, de l’oie sauvage ; grignotent de l’oignon au petit déjeuner sans se priver de harengs en robe de chambre. Un philosophe a noté : « celui qui digère les cuisines chargées s’allie tous les peuples ». La bouffe dénoue les conflits ; le thé vert brûlant efface les mauvais souvenirs. « Dans la cave de ma belle-mère, raconte l’un de ces bons vivants passablement torché, on retrouve assez de tonneaux pour assurer la bonne humeur d’une armée devant la prochaine guerre de cent ans ». Aussi déroutantes que sont ces cuisines, ne pas perdre de vue que l’art culinaire de l’ex-URSS s’est enrichi du passage des Grecs, des Turcs, des Mongols. Le grand poète Wladimir Maïakowski s’adressant aux fins becs de ces régions recommandait de ne pas oublier « de manger des ananas avant de pousser votre dernier soupir ». Ce livre est destiné aux aventuriers de la table, pionniers du vivre ensemble, d’une Europe à venir, complètement fraternelle.
Alfred Eibel
Editions Gaïa, 189 p., 19 €.