Voici le destin tragique d’Ernst Toller (1893-1939), ancien membre du mouvement révolutionnaire de Bavière (1918). Il s’est vite rendu compte que la vieille Europe s’effritait, que la jeunesse allemande avait été honteusement victime d’hommes sans foi ni loi. La propagande pacifiste d’Ernst Toller lui vaut d’être condamné à mort après l’écrasement des soviets de Bavière, puis sa peine commuée en cinq ans de prison. De sa cellule, il observe les hirondelles bâtir un nid avec application et amour. Lui, si inquiet et fébrile, n’a-t-il pas lutté contre l’abêtissement des esprits, contre l’idolâtrie de l’État, sans ménager ses efforts ni sa santé ? En prison, il commence à écrire des pièces de théâtre expressionnistes racontant les turbulences de l’Allemagne. Par exemple Die Wandlung1 qui paraît en 1919, atteignant vingt mille représentations en 1922. Comme d’autres de ses pièces, Toller veut démontrer, nous conter ; mêler le fantastique à des scènes brutales. L’arrivée d’Hitler au pouvoir le pousse à se rendre en Espagne pour aider les enfants réfugiés. Rien de ce qu’il espérait de la République de Weimar n’a donné naissance à une société foncièrement démocratique, apaisée, non nationaliste. Désespéré, Ernst Toller se rend à New-York. On le retrouve pendu dans une chambre d’hôtel en mai 1939.
1 La transformation
Alfred Eibel.
Éditions Séguier, 336 p. 21 €.