La fille de Max Fritsch (1911-1991) raconte son père. De la difficulté à porter le nom d’un écrivain célèbre, un écrivain fort en gueule suivant les circonstances. Entre Ursula et Max se noue une forte amitié, de l’estime. C’est insuffisant. Suivant l’humeur, la tendresse est au rendez-vous. Quand on se quitte ou quand on se retrouve. Elle ne pouvait affleurer qu’entre deux portes, quand Max Frisch posait ses bagages ou au contraire quand il embarquait pour une destination nouvelle. Il aura vécu à Rome, à Zurich, à Locarno, à Berlin, à Venise, à New-York, européen dans l’âme et citoyen du monde. « Je l’aimais comme j’ai aimé toutes les femmes de mon père, c’est-à-dire beaucoup ». La plus connue se nomme Ingeborg Bachman (1926-1973) femme de lettre autrichienne, auteur de romans, de drames radiophoniques. Elle est sur la même longueur d’ondes que Frisch. Elle pense que le malheur des hommes tient à un défaut structurel de la société. L’image du monde dans lequel évoluait Max Frisch ne pouvait que le mettre en colère. Tout au long de ce témoignage bouleversant on assiste entre père et fille à de l’incompréhension, de la distance ; à des instants de bonheur? Un comportement très élastique. On apprend le peu de tolérance dont faisait preuve Frisch envers les êtres négligents. Bien après sa mort, Ursula Priess cherche encore à savoir qui était son père. De lui elle hérita la bougeotte et son goût pour l’amour renouvelé. Elle constate qu’il n’est pas facile de trouver sa place dans un monde périlleux.
Alfred Eibel
Éditions Zoé, 157 p., 17 €.