Peut-être faudrait-il lire Le bain de Diane de Pierre Klossowski (1905-2001) pour comprendre sa manière de pénétrer l’œuvre de Marcel Proust. Entrer très avant, percer le cœur de l’écrivain, descendre dans ses profondeurs, comprendre, saisir, ramener à soi sa vision intérieure. Il y a, quoi qu’on en dise, chez Marcel Proust, depuis l’enfance, ce qui n’a jamais cesser de le remuer, l’œuvre de Charles Perrault à laquelle il semble vouloir revenir à travers ses figures obsessionnelles, à sa « rhétorique spiralante », lorsque reprenant le passé, Marcel Proust lui confère un mouvement nouveau en harmonie avec l’œuvre en train de se construire, une forme d’imitation, d’embellissement ou ce qui corrode la mémoire, une hantise du révolu, une forme de jubilation qui le pousse à poursuivre son chemin sachant que la vie s’écoule irrémédiablement. Assistant si l’on ose s’exprimer ainsi avec une patience de chartiste au lent épanouissement d’un parterre de nénuphars sur un étang immobile. Pierre Klossowski se veut encerclé par cette œuvre qu’exprime autrement Georges Perros : « À partir d’un certain degré d’attention, le langage « lange » l’homme, le « borde », le « rattrape ». Klossowski s’est laissé volontairement engloutir par les sables mouvants d’À la recherche du temps perdu pour en ramener les instants privilégiés. C’est en cela que la tentative de Pierre Klossowski porte son originalité. La question qu’il faut se poser : l’œuvre de Marcel Proust ne tient-elle pas également à l’oisiveté d’une partie de la vie de l’écrivain, à sa maladie et à son indéniable souffrance ?
Alfred Eibel.
Serge Safran éditeur, 144 p.15,90 €.